Le Théâtre


 

Constantine, un théâtre, quelques fantômes et Gluck par Alain Amato

Le site du théâtre régional de Constantine

Le théâtre en cartes postales

Un programme de la saison 1946-1947


Le rideau du théâtre.

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Ce théâtre, dont la construction a débutée en 1861, a été inauguré le 6 octobre 1883. Il est l'œuvre des architectes Jean Gion (1838-1898) et Jean Monnier. Certaines, ou toutes, les sculptures ornementales sont de Gustave Germain (1843-1909).

Le bâtiment est réalisé en pierre appareillée. Les façades sont des chefs-d’œuvre de l’architecture classique du 19éme siècle.
Les soubassement de la façade principale est en pierres brutes bouchardées. Dans la hauteur du hall, la façade est habillée d’un placage de pierres claires appareillées par joints creux horizontaux, et au niveau de l’étage, la façade est composée à l’antique : piliers en saillie, fenêtres avec frontons, balustres en balcons et acrotères, sculptures allégoriques en fond de niche encadrant les balcons.
La salle de spectacles du théâtre de Constantine par ses peintures, ses motifs, ses sculptures, ses décors est le reflet d’un style qui s’associe à la conception historique du théâtre à l’italienne, ajoutant à cela, l’escalier monumental et d’honneur en marbre, œuvre artistique remarquable.
La cage de scène est une vraie pièce de musée conçue selon le système traditionnel des premiers théâtres construits dans le monde.

Aujourd'hui il abrite le "Théâtre Régional de Constantine" (TRC)
1, rue Bounab Ali - 25000 Constantine (Algérie)
Tél : 213 31 64 26 98 - 99
Fax : 213 31 94 87 82
 


Les "Compagnons du Vieux-Rocher"
troupe de théâtre dans les années 40.

 

Jeudi, 26 Juillet 2001

Théâtre de Constantine : Les rénovations aux mille facettes
Pour entrer dans ce haut lieu de la culture, où chaque soirée devient un événement historique, il faudra encore patienter quelque temps.
C’est l’histoire d’un endroit mythique, ensorceleur. L’histoire d’une vieille cité qui s’obstine à défendre sa conscience, sa mémoire. C’est, enfin, l’histoire la plus connue sur la place publique ici, au Vieux rocher. L’histoire du théâtre de Constantine.
Tout débuta avec la "conquête" des français qui ambitionnaient de nous conter l’Histoire, de marquer la puissance civilisatrice en édifiant une œuvre architecturale qui effacerait le prestige du somptueux palais du Bey. Le conseil municipal se réunira dès 1850 pour débattre de l’éventualité de construire un opéra à Constantine, d’autant plus qu’Alger se dotait déjà de son théâtre. Et donc, il fallait faire vite et surtout faire bien. Ainsi, la caserne des janissaires, située en plein cœur de Bab El-Oued, sera détruite pour laisser place au futur théâtre de Constantine. Un concours international est alors lancé et l’on optera finalement pour un opéra de style italien, avec des loges et des galeries pouvant accueillir jusqu’à 600 spectateurs.
La construction de cet édifice associera alors de grands peintres et sculpteurs qui réalisèrent les statues, les bas-reliefs de la façade et les peintures à l’intérieur du théâtre. Ces artistes ne purent pas échapper à l’influence des chefs-d’œuvre architecturaux de la renaissance italienne également, inspirés de la Rome ancienne. D’ailleurs, cette influence est fortement ressentie au niveau des colonnes toscanes et composites des péristyles et salle de spectacle. Les travaux sont lancés en 1861. Ils dureront plus de vingt ans.
Le 6 octobre 1883, l’Opéra municipal de Constantine est inauguré. L’œuvre est somptueuse, époustouflante. Depuis cette date, les Français et quelques indigènes — parqués au poulailler — ont pu acclamer des opéras de Mozart, Verdi et on eu droit aux plus grands spectacles de l’époque. Farid El-Attrach s’y est produit en 1948, Youcef Wahbi en 1949. Depuis l’indépendance, le théâtre de Constantine a accueilli des troupes plus prestigieuses les unes que les autres. Ont été programmés : le Cirque de Moscou, le Ballet Mossoev, la Comédie française et autres Maria Casares, Faïrouz, Essafi, Warda, Belkhayat… Les plus grands artistes algériens sont également passés par là : El Anka, El Ankis, Guerrouabi, etc. La liste est davantage exhaustive. Plus d’un siècle est passé depuis l’inauguration du théâtre municipal de Constantine. Fatiguée, surmenée, la bâtisse, jadis chaleureuse, est devenue une source potentielle de danger public. "Nous vivions sur une boîte d’allumettes", nous a déclaré M. Merabia, directeur du TRC.
"L’installation électrique devenait dangereuse", a-t-il ajouté. D’ailleurs, la Protection civile avait déjà signifié, cela fait 15 ans, la fermeture pure et simple du théâtre. Et donc, il fallait redonner de l’aplomb à cette bâtisse centenaire surmenée par tant de gloire et part tant de passion. On décide alors de lui "octroyer" une "remise à niveau", ce que le plus commun des Constantinois appellera "restauration". "Ce n’est pas une restauration", a rappliqué M. Merabia. Pareille entreprise nécessiterait le déploiement d’un arsenal de gens spécialisés en la matière qui ne sont même pas disponibles à un niveau national, ce n’est qu’une opération de "retape" afin de rendre ce monument cultuel plus attractif. Des sommes importantes ont été débloquées pour restaurer le TRC.
Cette restauration, comme il est convenu de l’appeler ici à Constantine, consistait en la mise en place de nouveaux équipements électriques, d’un nouveau procédé d’éclairage, en l’installation du chauffage, de la climatisation, de la siégerie et de la sonorisation. "Aujourd’hui, on peut affirmer que le TRC est doté d’équipement à même d’assurer une convenable fonctionnalité", nous a déclaré M. Merabia. Et cette opération de restauration est étonnante, pleine de hasards objectifs, pleine d’instructions, de rencontres fortuites, de coups de cœur et de coups de "gueule". Au départ, il fallait de l’audace et de la passion.
Dès lors, à la magnificence architecturale, à la restauration d’un lieu, témoin d’une époque, se sont greffées les nécessités fonctionnelles relevant de la fabrication du spectacle. Vingt mois de dur labeur et sûrement plus ont été nécessaires pour réveiller ce théâtre "fantôme" pour le renaître de ses cendres et pour le réconcilier avec sa prestigieuse et non moins historique troupe.
Cette rénovation était une gageure, un pari, et à chaque jour suffisait son lot de fatigue, d’incompréhension, de doute et de peur de mal faire. Pour le maître d’œuvre, le plus dur était de concilier les fonctionnalités des nouveaux équipements avec l’essence même du style architectural de la bâtisse. Et entre le geste architectural et cette périlleuse et complexe fonctionnalité, il fallait rénover avec une extrême prudence afin de sauvegarder le style italien de l’opéra de Constantine. "Ce n’était pas facile", nous a déclaré le directeur du théâtre, apparemment surmené par tant d’efforts. "Il ne s’agissait pas de restauration, qui aurait supposé une autre démarche et des moyens beaucoup plus conséquents, mais d’une opération urgente de sauvetage du TRC", a-t-il ajouté.
Enfin, les travaux qui prendront fin incessamment permettront aux Constantinois de "redécouvrir" le théâtre régional de Constantine, leur théâtre. Quant au premier spectacle, il faudra patienter encore quelque temps, car c’est là une autre histoire, une autre rencontre.

Delizia Ben - Liberté

L'escalier
La salle
Balcon
Petite loge
Lustre
Machinerie

Détail d'une loge

 

La Nouvelle République - 29 mars 2022

Un édifice qui résiste à l'épreuve du temps
TR Constantine

Rédaction LNR

Incarnant le style architectural de l'opéra à l'italienne, unique en son genre en Algérie et dans le Nord de l'Afrique, le Théâtre régional de Constantine (TRC) «Mohamed Tahar Fergani» résiste à l'épreuve du temps, près de 140 ans après son inauguration. Depuis sa façade antique, avec balustres en balcons et sculptures allégoriques, à la salle de spectacles avec son centenaire rideau arlequin, à son lustre imposant en bronze et en cristal, l'édifice est une véritable «pièce de musée».
Sa préservation constitue la mission principale des responsables de ce haut lieu de la culture, précise à l'APS l'enseignant et chercheur dans l'histoire du Théâtre de Constantine, Mohamed Ghernaout, à l'occasion de la célébration de la Journée mondiale du théâtre (27 mars).
Selon M. Ghernaout «une attention particulière» est accordée au lustre impressionnant par son envergure et son rayonnement, suspendu depuis 1883 au plafond de la salle de spectacles. «Ce lustre, d'une hauteur de 2,80 mètres sous plafond, fonctionnait au gaz jusqu'au début du 20e siècle, puis avec l'avènement de l'électricité des fils électriques ont été placés dans les conduites à gaz», a relevé M. Ghernaout, également journaliste et chargé de communication au TRC pendant des années.
Et de souligner: «En 1999, dans le cadre de la vaste opération de rénovation du théâtre, le lustre a été démonté pièce par pièce, une première, ensuite nettoyé et remonté lors d'une opération chapeautée par l'architecte Yahia Boulekroun et l'ancien directeur du TRC, le défunt Salim Merabia».

De jeunes compétences au chevet des œuvres d'art
L'actuel directeur du TRC, Ahmed Mireche relève de son côté que «ce qui apparaît au public du grand lustre, à savoir l'ossature en bronze doré, le cristal, les couronnes et les ampoules électriques ne sont qu'une partie de l'œuvre», révélant que le lustre conservé à l'identique comprend tout un équipement régulièrement contrôlé et entretenu, notamment le système de contrepoids relié à un treuil qui en assure la stabilité et permet de faire descendre ou remonter cette merveille. Et d'ajouter: «de jeunes compétences algériennes assurent l'entretien courant et spécifique du chef d'œuvre».
M. Ghernaout souligne également que le théâtre a su conserver le rideau Arlequin en velours rouge de neuf (9) mètres de longueur et de 7,5 mètres de largeur, drapé et bordé d'une frange dorée et décoré de délicats motifs, installé dans les années 1920.
«Le rideau a été restauré une première fois en 1999 par des artistes de l'Ecole des beaux-arts et également en 2018», a-t-il confié.
«La restauration n'avait ciblé que le tissu, renforcé grâce à des techniques de préservation utilisées en pareil cas, dans une première conduite par les artistes Farid Merabet et Mouloud Kara, et une autre opération menée en 2018 par l'équipe technique du TRC supervisée par le directeur Ahmed Mireche», a-t-il détaillé.
Il a, dans ce sens, précisé que les motifs peints sur le rideau ou les franges dorées demeurent à l'identique en dépit du poids du temps, de même pour la machinerie scénique du théâtre, restée telle qu'elle depuis 1883. C'est également le cas, dit-il, du tableau de bord des effets visuels et sonores de l'époque avec ces tuyaux régulant l'intensité des lumières au cours du spectacle demeure intact.
«Les techniciens du TRC se sont déployés à nettoyer cet appareillage pièce par pièce et il est exposé au hall du théâtre», souligne M. Mireche qui rappelle que ce théâtre a été classé monument national, inscrit sur la liste des biens culturels le 17 mars 2010.

Le TRC classé au patrimoine mondial, un objectif
Pour les artistes de la ville de Constantine, les cadres du secteur de la Culture, les chercheurs et universitaires en rapport avec l'art et la culture, la classification du Théâtre régional «Mohamed Tahar Fergani» en tant que patrimoine mondial est «un objectif commun et partagé». «De par ses caractéristiques d'authenticité et d'intégrité s'agissant des aspects architecturaux, artistiques et culturels, le Théâtre de Constantine a toutes ses chances pour être classé en tant que patrimoine mondial», affirme M. Ghernaout.
De son côté, M. Mireche révèle que l'administration du Théâtre finalise les procédures d'une demande de classification de ce haut lieu de la culture, devant être envoyée au ministère de tutelle. «Outre le luxe de la décoration, le TRC a cette particularité d'avoir su préserver son style d'opéra à l'italienne concernant l'organisation du volume intérieur, la taille de la salle des spectacles, les galeries, les loges, le poulailler, la scène et ses caractéristiques techniques», détaille-t-il.
M. Mireche souligne également que la classification du Théâtre de Constantine en tant que patrimoine mondial lui permet «une visibilité à l'international et une préservation qui appuie les efforts déployés depuis des décennies à maintenir intact le bâti».
R.C.